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1 million de voitures électriques en plus en Europe en 2020… Mais combien de voitures trop polluantes en moins ?

Publié le 10 septembre 2019 , mis à jour le 16 novembre 2020

Alors que le Salon automobile de Francfort ouvre ses portes dans quelques jours, les constructeurs s’apprêtent à dévoiler les nouveaux véhicules électriques. Les Etats, et la France en particulier, ont un rôle majeur à jouer dans les semaines et mois à venir pour influencer le marché. C’est à travers la fiscalité, les aides à l’achat et la politique de mobilité durable - tous modes confondus- que se concrétisera, ou non, la sortie des carburants fossiles et le virage vers l’électromobilité.

Selon l’ONG Transport et Environnement, qui publie ce lundi une nouvelle étude, les constructeurs pourraient vendre en Europe jusqu'à un million de véhicules électriques à batterie (VE) et hybrides rechargeables (VHR) l'année prochaine. L’objectif est clair : répondre à la réglementation de l’Union européenne sur les émissions de CO2 et éviter les lourdes amendes qui pèseront sur les constructeurs en cas de non-respect des règles à partir de 2021. Pour autant, le nombre de nouveaux véhicules trop polluants, notamment de type SUV, ne baisse pas. Le pari économique et environnemental de l’électromobilité n’est donc pas gagné.

Les voitures neuves émettent toujours autant -voire plus- de CO2

Le transport est le principal problème climatique de l’Europe, représentant plus du quart (27%) des émissions totales de gaz à effet de serre du bloc. Les voitures émettent 44% des émissions des transports et continuent d'augmenter.

D’ici 2021, les constructeurs automobiles européens sont censés faire tomber les émissions de CO2 des voitures neuves sous le seuil moyen des 95g/km (avec des objectifs différents pour chacun en fonction de leur production). Un objectif qui semble difficilement atteignable si l’on observe le marché actuel. La moyenne des émissions de CO2 des véhicules neufs vendus en Europe oscille entre des valeurs supérieurs 140g CO2/ km en Estonie ou au Luxembourg, et 106g pour l’Espagne ou les Pays-Bas…  En France les voitures neuves émettent 112g de CO2 / km en 2018. Ce chiffre est en hausse depuis deux ans.

Les experts de T&E, dans une étude publiée ce lundi 9 septembre, constatent ce retard et mettent en cause la promotion des SUV, inefficaces et plus polluants que les autres véhicules, et les retards accumulés dans l'investissement dans les technologies propres nécessaires pour respecter la loi sur le CO2 des voitures.

SUV

• Depuis 2013, le boom des ventes de SUV en Europe a entraîné une augmentation de 2,6 g de CO2 / km, soit 10 fois plus que l'augmentation de 0,25 g de CO2 / km imputable à la baisse du diesel. 

• Les ventes de SUV en Europe sont passées de 7% en 2009 à 36% en 2018. Sans changement majeur des comportements d'achat, Les SUV devraient peser près de 40% d'ici 2021.

Pour se conformer à cette règlementation européenne, les grands constructeurs automobiles ont donc fait le choix de développer les véhicules électriques.

Le virage du secteur auto vers l’électrique : un pari économique et environnemental qui reste à gagner

Dans les années à venir, les voitures devraient être de plus en plus électriques, et ces voitures électriques seront donc plus abordables. L’analyse réalisée par T&E estime qu’en 2020, les ventes de véhicules électriques seront d’environ 5%, pour atteindre 10% en 2021. Le coût des investissements nécessaires de la part du secteur automobile pour respecter la réglementation CO2 est deux fois moindre que le coût des amendes qui seront requises en cas de non-conformité.

L’électromobilité devient de fait incontournable dans les années à venir. Le décollage du marché de la voiture électrique est une des étapes indispensables pour atteindre les objectifs climat. Mais ce ne sera pas suffisant. Il faudra aller plus loin : l’électromobilité doit rimer avec nouveaux services, partage, prix accessible et simplicité d’usage, efficacité des infrastructures de recharge, électricité d’origine renouvelable, batteries recyclables… Sortir de l’ère des carburants fossiles, reléguer le dieselgate au passé suppose une transformation bien plus large. C’est la condition pour réussir ce pari économique et environnemental. 

Pour les constructeurs, la mise sur le marché de ces nouveaux véhicules devra donc rapidement être suivies de mesures concrètes pour ne pas s’arrêter à mi-chemin de la transition et en garantir la réussite économique sur les territoires :

Programmer la fin de la vente des véhicules les plus polluants, à commencer par celles qui consomment le plus de carburant et émettent le plus de CO2. Si l'UE veut atteindre les objectifs de l'accord de Paris de limiter le réchauffement climatique en deçà de 2°C et au plus près de 1,5 ° C, les émissions des voitures doivent être nulles d'ici 2050, ce qui signifie que la dernière voiture diesel ou essence devra être vendue d'ici 2030 et au plus tard à 2035.

Définir une stratégie économique pour le secteur automobile au niveau européen, entre les Etats et les constructeurs, pour intégrer la fin des moteurs essence et diesels, et miser sur les nouveaux métiers liés à l’électromobilité, la formation, les nouveaux services... pour accompagner ces mutations extrêmement rapides. 

Loi de mobilité, loi de finance, économie circulaire… La balle est dans le camp du gouvernement et du Parlement

La politique de chaque Etat aura une influence considérable sur l’atteinte ou non des objectifs climat de l’Union européenne. Elle permet en outre d’orienter les achats de véhicules neufs vers les véhicules les moins polluants. A titre d’exemple, les Pays-Bas ont l'une des plus fortes proportions de véhicules électriques en Europe, grâce aux taxes sur les véhicules qui récompensent fortement l'achat de modèles à zéro émission.

D’ici la fin de l’année en France, les débats législatifs ouvrent 3 opportunités, qui seront autant de tests sur la sincérité de l’ambition écologique de la majorité politique :   

Renforcer les objectifs de la Loi Mobilité (LOM), pour aller plus vite notamment sur la conversion des flottes de taxi et d’entreprises. 

Voter un Projet de loi de finances qui soutienne enfin à travers la fiscalité la réduction des consommations d’énergie et des émissions de CO2 des véhicules : des taxes plus fortes sur les véhicules neufs les plus polluants, des aides à l’achat pour les voitures les moins polluantes uniquement. Ce sera le débat sur le bonus-malus, et la prime à la conversion

• Réguler la publicité sur l’automobile (plus de 3 milliards d’euros par an), à l’occasion de la loi sur l’économie circulaire, pour l’orienter vers les modèles les moins polluants en cohérence avec les objectifs climat. 

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