Production du think tank

[Replay] Débat : Comment garantir un avenir aux agriculteurs tout en protégeant l'environnement ?

Publié le 02 juillet 2021 , mis à jour le 16 janvier 2024

Le 7 juillet, le Think Tank de la FNH inaugurait les Talks, des événements pour dialoguer et débattre des solutions pour opérer la transformation écologique et sociale. Cette première édition comptait avec deux invités d’exception : les ministres Julien Denormandie et Clément Beaune. Retour sur ce débat événement.

Visionnez le replay du 7 juillet !

Les invités :

  • Julien Denormandie, Ministre de l'Agriculture et de l'Alimentation
  • Clément Beaune, Secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des Affaires étrangères, chargé des Affaires européennes.

Ont débattu avec :

  • Bruno Dufayet, éleveur, Président de la Fédération Nationale Bovine
  • Mathilde Dupré, Co-directrice de l’Institut Veblen
  • Amandine Lebreton, Directrice du plaidoyer à la Fondation Nicolas Hulot
  • Samuel Leré, Responsable plaidoyer à la Fondation Nicolas Hulot
  • Marine Colli, Responsable enjeux publics, INTERBEV

Avec la participation de :

  • Nicolas Hulot, Président d'honneur de la FNH
  • Chantal Jouanno, Présidente de la Commission Nationale du Débat Public

Le débat était animé par Walter Bouvais, Cofondateur de la Fabrique Open Lande, ancien directeur de la publication de Terra eco.

Au coeur du débat

Comment assurer le futur de nos agriculteurs, tout en accélérant la transition agroécologique d’un secteur aujourd’hui en crise ? A l’occasion de ce Talk exceptionnel, la Fondation Nicolas Hulot, l’Institut Veblen et Interbev ont posé aux deux ministres présents les vraies questions :

  • Quel rôle de l’Europe pour stopper la distorsion de concurrence entre les produits européens et les produits importés, qui pénalisent tant les agriculteurs que l’environnement ? Qu’est-ce que la France s’engage à porter à l’occasion de de la Présidence française de l'UE en 2022 ?
  • Au-delà, et pour éviter tout abaissement des normes européennes, quelles politiques pour permettre la transition notamment en terme d’accompagnement des agriculteurs ?

Sur quoi se sont engagés les ministres ?

Les ministres se sont à maintes reprises engagés publiquement à soutenir les mesures-miroirs dans la perspective de la présidence française de l’UE. Au-delà de ce soutien de principe, l’échange a permis de noter que le gouvernement s’engagera sur certains points essentiels :

Engagement 1 : une approche des mesures-miroirs non pas basée sur les Limites maximales de résidus (LMR), qui mesurent le résidu de pesticide sur l’aliment, mais sur l’ensemble des méthodes de production. Autrement dit, les mesures-miroirs concerneraient les pesticides utilisés sur l’ensemble de la culture, du semis au stockage. Ainsi, les denrées alimentaires produites avec des pesticides interdits en Europe, ne pourraient donc pas rentrer sur le marché européen. Aujourd’hui, ces denrées peuvent rentrer si elles respectent des LMR, souvent rehaussées par des géants comme Monsanto, au détriment de l’environnement et de la santé des consommateurs.

Engagement 2 : mettre fin aux dérogations pour certains produits ou substances pour rentrer dans le cadre de l’OMC. Actuellement, au vu des nombreuses dérogations octroyées par la France, par exemple celle pour les pesticides néonicotinoïdes sur la betterave, l’OMC ne permet pas d’instaurer des mesures-miroirs sur de nombreuses substances. En effet, interdire l’entrée d’aliments produits avec une substance, lorsqu’on a recours à cette substances à l’intérieur même du territoire, est considérée comme allant à l’encontre des normes commerciales.

Plus largement, sur la politique commerciale, les ministres se sont engagés à ce que :

Engagement 3 : l’accord conclu entre l’UE et le Mercosur ne sera jamais ratifié car c'est un mauvais accord, en raison premièrement des faibles standards sanitaires et environnementaux des viandes bovines provenant des pays du Mercosur. Deuxièmement, parce que la France ne parviendra pas à obtenir sa renégociation pour le rendre plus ambitieux d’un point de vue environnemental.

Engagement 4 : la France s’opposera à tous les mauvais accords de commerce, c’est-à-dire ceux qui n’intègrent pas les mesures-miroirs dans leur conditionnalité.

Engagement 5 : pas de « scission » des accords bilatéraux UE-Mexique et UE-#Mercosur, tel que le souhaite la Commission européenne, pour faciliter la ratification de ces accords. La France, comme chaque pays européen, gardera donc son droit de veto au conseil.

Engagement 6 : la fin des importations de viande issus de bovins traités avec des antibiotiques activateurs de croissance. L'acte juridique visant à les interdire sera adopté avant janvier 2022.

Les points de désaccord

Afin de déployer pleinement la transition agro-écologique, les mesures-miroirs sont une condition nécessaire, mais pas suffisante. Pour permettre aux agriculteurs de s’engager pleinement, les politiques publiques d'accompagnement, comme la Politique Agricole Commune (PAC) et sa déclinaison française le PSN, sont absolument essentielles.

Le débat a également mis en évidence les oppositions de vue sur les derniers arbitrages de la PAC et en particulier sur la partie des aides environnementales. Deux points se cumulent :

  • la réduction des aides environnementales à la bio. Ce sont les aides dont bénéficient les agriculteurs qui mettent en place des pratiques aux impacts avérés pour l’environnement. Le PSN acte une fin des aides au maintien qui promettaient un appui dans le temps en relai de l’aide à la conversion. Ces aides rémunèrent les services rendus par ces modèles agricoles, contrairement à une majorité des aides de la PAC qui rémunèrent par hectare. La FNAB a calculé que les aides environnementales à la bio sont ainsi réduites de 66% dans cette nouvelle PAC. Malgré les allégations de Julien Denormandie, la FNAB continue de communiquer sur ce chiffre et de dénoncer cette importante baisse des aides. 
  • l'agriculture bio est considérée au même niveau que la Haute valeur environnementale pour l’accès aux aides de l’éco-régime . On met sur le même plan, au même niveau d’aide, l’agriculture bio - dont les impacts avérés - et la HVE dont l’Office français de la biodiversité dit que le label ne présente, dans la grande majorité des cas, aucun bénéfice environnemental. Idem pour le HCC qui préconise de revoir l’éco-régime sur ce point. Le PSN ne rémunère pas les services en proportion de leur performance : on fait le choix de niveler les aides environnementales et de ne pas différencier les pratiques et les systèmes en fonction de ce qu’ils apportent à la société. Comme le note France stratégie, on décorrèle les services rendus et le niveau de rémunération.

L'article vous a été utile pour mieux comprendre cette actualité ?

Pour approfondir le sujet

Mondialisation : comment protéger l’environnement et les agriculteurs ?
Réduction des pesticides en France : pourquoi un tel échec ?